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EPHRAIM URBACH





Les Sages

HOMMAGE
AKADEM
MESSIE


E. Urbach (1912-1991) a enseigné à l'Université hébraïque de Jérusalem. Il demeure aujourd'hui une référence majeure en matière de littérature rabbinique ancienne et médiévale. Il est notamment l'auteur des Baalei ha-Tosafot, Jérusalem, 1955, ouvrage qui constitue le fondement de toute étude de l'école des Tosafistes du Moyen Age. Il a été l'objet d'un volume d'hommage : Rashi 1040-1990, Hommage à Ephraïm E. Urbach, Congrès européen des Etudes juives, éd. par Gabrielle Sed-Rajna, Paris, Cerf, 1993.
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"L’élection fut celle d’un peuple entier et l’Alliance fut contractée à la condition que les Israélites seraient garants les uns des autres (Yisra’el Aravin ze la-ze)[…] Israël est devenu une « nation une » en vertu de l’Alliance, et nul ne peut se réjouir lorsqu’une partie de la collectivité est châtiée ou affligée, contrairement à ce qui se produit parmi les autres peuples. Ces derniers, même s’ils sont membres d’une même foi, n’est sont pas moins divisés en nationalités dressées les unes contre les autres. Cette responsabilité mutuelle entraîne le châtiment collectif, sans qu’aucune protestation ne soit possible […]car cette responsabilité collective ouvre la possibilité de la réparation et garantit le maintien de la relation particulière d’Israël à son Dieu. [… ]La garantie mutuelle, qui entraîne le châtiment sur la totalité du peuple porteur de la responsabilité du péché, implique aussi la garantie qu’Israël retournera sur la voie de la rectitude et, du même coup, est une assurance du retour de la nation à son existence éternelle ."


Dans son monumental ouvrage Hazal, Pirqué emounot ve-deot (« Les Sages d’Israël, conceptions et croyances des maîtres du Talmud »), qui vient de faire l’objet d’une volumineuse publication coéditée par le Cerf et Verdier, Ephraïm Urbach, mort à Jérusalem en 1991 à soixante-dix-neuf ans, propose une étude théologique de première importance. Ce livre, que l’on doit à la traduction de Marie-José Jolivet, couvre près de mille ans d’élaboration de la pensée du judaïsme, de sa conception du monde et de Dieu, sur une période allant de la révolte des Macchabées à la fin de la rédaction du Talmud. Sous le terme grec de théologie, nous entendons l’étude conceptuelle des croyances fondamentales élaborées par les Talmidé Hakhamim, et qui aboutirent à l’extraordinaire corpus comprenant les deux Talmuds, celui de Babylone et celui de Jérusalem, l’ensemble des Midrashim et des Tosefta.
La méthode d’analyse adoptée ici par le grand savant que fut Ephraïm Urbach est la méthode philologico-historique, qui permet d’appréhender les concepts sur lesquels la foi juive s’est construite, sur un fonds culturel et historique qui a vu l’hellénisation du Moyen-Orient concomitant avec la naissance du christianisme. Ephraïm Urbach a élaboré sa Somme théologique à partir du concept de l’unicité de Dieu pour aboutir, avec son dix-septième et dernier chapitre, à la thématique juive majeure de la Rédemption. Entre en jeu l’une des données qui opposa si longtemps juifs et chrétiens, c’est-à-dire la question de savoir « si l’on est sauvé par la foi ou par les œuvres ». Urbach présente un parallèle entre les deux conceptions. C’est Saül de Tarse, dont on reconnaît « la haine de soi juive » qui le caractérise, qui enseigna : « Mais aucun homme n’est justifié par la Loi en face de Dieu, cela est évident car le juste vivra par la foi » (Gal. 3,11). Ce texte, Urbach le met en opposition avec ce passage de la Mekhilta de R. Ishmaël : « Néhémiah dit : Quiconque accepte un seul commandement avec foi [var. : Quiconque accomplit un seul commandement] est digne que l’esprit de sainteté repose sur lui (...). »
Un magnifique passage de Philon, de haute portée métaphysique, prend l’exemple d’Abraham pour affirmer « que faire confiance à Dieu seul et ne rien Lui associer d’autre n’est pas un mouvement facile, en raison de la proximité qu’entretient avec nous la mort... ». Il est intéressant de noter que cette pensée se retrouve quelque vingt siècles plus tard chez Emmanuel Lévinas se référant à Abraham.
Dans son chapitre IX, « Celui qui parla et le monde fut », Urbach aborde la question centrale de la création (Qu’est-ce qui fut créé en premier : les cieux ou la terre, la lumière ou les ténèbres ?), pour mieux faire ressortir non seulement les contradictions mais aussi les proximités entre Ben Zoma, R. Aquiba et R. Yehudah. À la question de R. Yehoshua « meayin ha-raglayim ? (Que se passe-t-il, Ben Zoma ? D’où viens-tu ?) », Ben Zoma répondit : « Lo me ayin [litt. : Ni de quelque chose, ni de quelque part] ». Et Ephraïm Urbach de citer en l’explicitant le commentaire percutant de Saül Lieberman, disant qu’il ne s’agit pas d’une réponse gnostique courante à l’époque mais d’une réponse juive signifiant « que l’homme a son origine dans une région de ténèbres, un lieu d’impureté, et, de là, progresse vers la pureté ».
Ce traité sur les Sages d’Israël rend compte de la complexité et de l’immensité du champ ouvert par les maîtres de la Mishna et de la Guemara, de la Halakha et des Aggadot. En aucune manière l’enseignement que l’on trouvera ici n’est dogmatique, le seul dogme étant celui de l’unicité irréfragable de Dieu.
Les enseignements talmudiques majeurs éclairés par l’érudition vertigineuse de Ephraïm Urbach, connaisseur non seulement des sages de l’époque talmudique mais également des maîtres contemporains, ne sont pas séparés dans cet ouvrage de parallèles avec ceux de la culture occidentale – ou plus précisément européenne, d’Homère à Kant.
Le dernier chapitre du livre est particulièrement saisissant en ce qu’il offre une analyse des plus pertinentes sur la pensée des Sages d’Israël relative à la rédemption et au Messie, qui se confond de plus en plus avec l’idée de messianisme car, comme l’enseigna Hillel : « Israël n’a pas de Messie ». C’est la conclusion à laquelle arrive l’auteur de Midrash Tehillim : « Le Saint, béni soit-Il, dit [à Israël] : Parce que votre rédemption avait été réalisée de main d’homme et que vos chefs étaient des mortels, lesquels un jour sont ici et le lendemain dans la tombe, votre rédemption fut temporaire. Mais à l’avenir, Moi, qui vis à jamais, je vous rédimerai Moi-même, Je vous rédimerai d’une rédemption éternelle. »verdier

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