DON YUCAF D' ÉCIJA
SEFARAD
ESPAGNE
Le Pourim de Castille
photo judaica
Un Juif illustre a la cour du roi Alphonse XI de Castille
par Ana Riano Lopez
Le développement des recherches ainsi que l'accroissement et le perfectionnement subis par les médias dans les dernières années ont heureusement augmenté dans notre société la connaissance sur les séphardis et leur géréreuse contribution à l'Histoire dans certains domaines. Il reste, cependant, de nombreux juifs espagnols d'autrefois qui se sont distingués par son bien faire dans les lettres, les sciences ou en politique et qui, malgré leurs vies exemplaires, n'ont pas encore atteint la diffusion méritée.
L'un de ces juifs illustres fut Yosef Halevi ben Efraim ben Yitzhak ben Shabbat , connu parmi les chrétiens par Don Yuçaf de Écija et qui atteignit le grand poste d'almojarife (ministre du roi) pendant le royaume d'Alphonso XI de Castille, de 1325 jusqu'à 1332.
Des données sur la personnalité et la vie de cet homme ont été recueillies par l'historiographie hébraïque dans le chapitre dix de la chronique de Shelomoh ibn Verga intitulée Shebet Yehudah, et par l'historiographie chrétienne en quelques documents qui ont réussi à adoucir le jugement négatif que certains historiens ont émis contre Don Yosef. La fidélité à ses ancêtres et à sa réligion, le bon usage de la justice et sa pitié lui valurent l'admiration de tous, jusqu'au point d'être comparé au Yosef biblique de Bereshit chapitre 37, dans le cité Shebet Yehudah, où l'on dit:
"Le Bon Dieu le poussa à entrer dans la Cour du roi et à recouvrer les impôts. Il se dévoua au service du roi, comme Yosef (c'est à dire, le Yosef biblique), du tout au tout. Il était intelligent, expert en musique, très gentil et le Bon Dieu était avec lui. Lorsque le roi vit qu'il était loyal et compétent il le mit à la tête de tout son royaume. Personne seyait sur lui de toute la Castille. Il était secundo, seulement après le roi, et le plus grand de tous les juifs. Yosef avait à son service des nobles qui mangeaient à sa table, son carrosse, des chevaux, et cinquante hommes couraient devant lui" (cfr. II Shemuel 15, 1).
Il y a à peine des références sur les premières années de sa vie. Il naquit à Écija (Séville) et, à ce que l'on croit, c'est là qu'il fit la connaissance de l'infant Don Felipe qui devint son protecteur. L'estime et l'admiration que l'infant éprouvait par Don Yosef étaient si profonds que lors de la majorité d'Alphonse XI et au début de son règne, il convainquit le roi pour le nommer almojarife.
De grands historiens tels que Yitzhak Baer, Amador de los Ríos ou Antonio Ballesteros nous racontent l'importance des interventions de ce ministre privé dans les décisions du roi surtout dans les affaires concernant les juifs. Nous savons que sa défense devant la Cour de Castille de tout ce qui pût bénéficier ses coréligionnaires fut toujours constante et efficace. Il fit bâtir une synagogue à Séville et une autre à sa ville natale et il vécut toujours préoccupé par son aljama, prêt à contribuer de son argent au maintien du Talmud Torah et des sabidores des précepts mosaïques.
Don Yosef vécut l'une des étapes les plus agitées de la Castille du moment, le problème juif aggravé par la conversion au christianisme du rabbin Abner de Burgos, qui prit le nom d'Alphonse de Valladolid. Il faut quand même remarquer que le roi Alphonse XI eut une attitude favorable envers les juifs pendant la plupart de son règne.
Ainsi donc, il y avait à Séville vingt-trois synagogues à la première moitié du XIV siècle; d'autre part, la société chrétienne fut toujours fortement influencée par les médecins, les almojarifes, les paysans et les commerçants juifs même s'ils n'en faisaient pas partie.
Nous savons tous que le sentiment d'envie envers le juif, en général, est endémique et que l'on peut trouver à n'importe quelle époque ou pays. La Castille ne fut pas l'exception et Don Yosef fut la victime, en plus de l'envie de certains de ses coréligionnaires (tal le médecin et astronome de Tolède Shemuel ibn Wacar), de la haine des infants et la méchancété de certains personnajes de la Cour, telle Doña Sancha, gouvernante de l'infante Léonore, soeur du roi. Mais sans aucun doute l'affaire concernant la vie de cet illustre séphardi qui eut le plus de rétentissement parmi les juifs de l'époque fut celle de Gonzalo Martínez qui, à ce qu'il paraît, s'était enrichi étant au service de Don Yosef. Il s'agit d'une affaire confuse seulement rapportée par les sources hébraïques. D'après ces dernières, Gonzalo Martínez, dépensier majeur et grand maître d'Alcántara, proposa à Alphonse XI une "solution totale" pour mettre fin aux problèmes financiers posés à la couronne par les juifs. Le plan consistait à les réduire à l'esclavage et vendre toutes leurs propriétés. Mais la mort prématurée de Don Gonzalo sauva les juifs du désastre.
Comme il était à attendre, cet événement demeura empreint dans la mémoire des juifs de l'époque et fut transmis aux générations suivantes, à l'aide des récits du sévillain Ibn Verga dans le chapitre dix du Shebet Yehudah. Ainsi donc, ce n'est pas rare de retrouver dans la littérature séphardi de la diaspora au XIX siècle cinq siècles après les faitsÄÄ la traduction en judéo-espagnol du Shebet Yehudah (Belgrade, 1859; réédité à Vienne, 1924) et du roman traduit également de l'hébreu intitulé Don Yosef, primo ministro de España (Salonique, 1891; réédité à Jérusalem, 1912) qui raconte, avec le recours à l'histoire et à la fiction, certains aspects de la vie du ministre cité. Le sujet principal du récit est la jalousie dont fut l'objet Don Yosef; en d'autres plan superposés paraissent de précieuses références à l'amour entre père et fille, à l'amitié, à la fidélité et à la justice, des valeurs qui confluaient dans la singulière personnalité de ce bon juif qui, en tout moment sut s'acquitter de ses devoirs envers le roi castillan et, en même temps, envers ses frères de réligion, jusqu'en 1332 où il cessa d'être almojarife et se retira en Andalousie pour vivre à Écija et à Séville.
Dans le roman, la vie de Don Yosef a une fin heureuse auprès de sa famille, mais dans la chronique Shebet Yehudah notre personnage meurt en prison. Le texte hébraïque signale le chagrin du roi, lorsqu'il reçoit la nouvelle de la mort en prison de son ministre qui avait été provoquée par Martínez et sa généreuse attitude envers les juif lorsqu'il connaît la duperie et le tort causé à ceux-là par le tyran. Suffisamment éloquentes sont les paroles avec lesquelles s'achève le chapitre dix du Shebet Yehudah et cette histoire exemplaire:
"Par ordre du roi tous les biens de l'ennemi (c'est-à-dire, de Gonzalo Martínez) et de ses frères furent vendus en écriture de vente en faveur des juifs qui séyaient à la porte du roi. Le roi enleva le cachet qui avait retiré au tyran, et l'accorda à Moshe. Ledit Moshe en fut heurex, et tous les juifs du royaume de Castille se réjouirent par toutes les bontés que le Bon Dieu avait accordé à Israël".
Lire : La priere de la polemique - la Benediction des heretiques
Par Carlos Del Valle - Madrid
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